Coronavirus : Pourquoi les médecins craignent-ils une deuxième vague du Covid 19 en Normandie ?

Pour la première fois, l'ARS constate une baisse du taux d'hospitalisation, en Normandie. Mais, ne nous réjouissons pas trop vite, préviennent les médecins du CHU de Caen et de l'hôpital Mémorial de Saint-Lô qui pensent au risque de deuxième vague.

Le 8 avril. C'est un jour particulier dans l'évolution de l'épidémie en Normandie. Le 8 avril, on a vu poindre dans le relevé quotidien de l'ARS (Agence régionale de Santé) un moins tant attendu devant le taux d'hospitalisation.

Après les + 77% il y a 10 jours et les 22% de jeudi dernier, les autorités sanitaires ont constaté ce jour-là une baisse de 4, 2% de patients hospitalisés, dans la région. Ce jeudi, 210 malades se trouvent encore dans un service de réanimation, soit une diminution de 6.6% en 72h.
 


"Redoublez de vigilance, surtout en ce moment"

 Le pic tant redouté est-il en train de se transformer en plateau, c'est-à-dire une stagnation de la courbe ? Les premiers effets du confinement se font-ils sentir ? 

A L'hôpital de Saint-Lô, dans la Manche, le chef de service des urgences, Thomas Delomas, constate que le temps a joué en leur faveur.

"Le Covid-19 est arrivé chez nous après les régions Grand-Est et Ile-de-France. Nous avons bénéficié de leur retour d'expérience. Nous avons pu mieux nous préparer. Un confinement précoce nous a également aidés. Et puis on a beaucoup beaucoup travaillé.

C'est l'ensemble de ces facteurs, qui commence à payer aujourd'hui. Mais attention,
prévient-il aussitôt, on voit encore beaucoup de patients, atteints par le covid-19, et notamment des jeunes."

 

Son confrère au CHU de Caen, le Professeur Eric Roupie, chef du Samu 14 - Smur - centre 15, ne crie pas victoire pour autant. Le maintien du confinement et le respect des gestes barrières vont être déterminants pour infléchir durablement la courbe.

 Si tout le monde se relâche et ressort, on vivra la même chose que dans le Grand-Est ou l'Italie. On ne tiendra pas. Nos services seront vite débordés. Il faut donc être patient. Se protéger et protéger les autres. C'est un acte citoyen.
 

 


A tous les étages des hôpitaux et des autorités sanitaires, c'est la prudence qui prédomine, car "on connaît mal ce virus, c'est tout nouveau", reconnaît Eric Roupie. Même Jean-François Delfraissy, immunologiste et président du Conseil scientifique, n'écarte aucune hypothèse et nous donne une vraie réponse de normand, à propos de notre région.
 

"Dans les régions de l'Ouest, on voit que le virus circule moins. On ne peut pas exclure qu'il n'y aura pas une vague dans un deuxième temps, en décalage mais peut-être que non parce qu'ils ont bénéficié du confinement national."


Pourquoi les médecins redoutent-ils aujourd'hui une deuxième vague ?

On a longtemps entendu le mot pic, dans le vocabulaire des spécialistes, habituez-vous au terme de "deuxième vague". Car c'est LE risque aujourd'hui.

Facteur de risque numéro un : une baisse de la vigilance

C'est bien connu, les accidents de voiture interviennent la plupart du temps, sur une ligne droite, sous un grand soleil, lorsqu'on baisse la garde, se pensant hors d'atteinte. C'est exactement pareil pour le coronavirus.

Un relâchement dans nos comportements et un déconfinement soudain ou mal préparé réduiraient à néant tous les efforts consentis par les français depuis le 17 mars. On l'a vu, ce coronavirus se propage à vitesse grand V. Il est sournois et peut avancer masqué.


La deuxième vague relancée par les sujets asymptomatiques

Si vous vous croyez en parfaite santé, alors que, sans le savoir, vous êtes porteur du virus, vous êtes ce que l'on appelle un sujet asymptomatique. Si vous sortez, vous pouvez contaminer entre 1 à 4 personnes, ça varie.

"C'est difficile donner des chiffres précis. Cela change tout le temps. Notre indicateur, appelé le RO se calcule à l'instant T et c'est très différent selon que vous habitez à la campagne ou en ville", précise Astrid Vabret, cheffe de service de virologie au CHU de Caen. "Les enfants, par exemple, peuvent être infectés, sans présenter de symptômes, mais ils restent contagieux."

 



Et vous ne seriez pas un cas isolé. D'après un article du British Medical Journal (BMJ), se référant aux données rendues publiques par les autorités chinoises, il apparaît ainsi que quatre infections au coronavirus sur cinq sont asymptomatiques. C'est dire.

Les médecins se documentent et en apprennent tous les jours sur ce redoutable virus: "Il y a énormément de publications en ce moment. Une étude toute récente, réalisée à Singapour sur 243 patients, montre que l'on peut être contagieux trois jours avant l'apparition des symptômes, alors qu'on pensait que ce n'était que 24h avant", explique Thomas Delomas, à Saint-Lô.

En résumé, si les gestes barrières et le confinement ne sont pas respectés, c'est reparti pour un tour. L'épidémie "saison 2" serait vite relancée.

La deuxième vague importée de l'étranger

Le coronavirus aime voyager, il a contaminé pratiquement toute la planète. Autant dire que la circulation risque d'être compliquée. En Chine, c'est simple, les frontières ont été fermées. Interdiction de rentrer dans le pays pour tous les étrangers.

Le gouvernement français en arrivera-t-il jusque là ? Faudra-t-il renoncer aux vacances estivales chez nos voisins européens, en Italie, en Espagne ou encore aux Etats-Unis, pour éviter d'importer à nouveau le covid-19 ? C'est la grande inconnue.
 


Une certitude. Emmanuel Macron prend la parole ce lundi. Ce risque de deuxième vague va sans doute le contraindre à annoncer dans un premier temps, la prolongation du confinement. Son premier ministre, Edouard Philippe, a déjà bien préparé l'opinion, en expliquant qu'il sera  « probablement » prolongé au-delà du 15 avril, et ne pourra être interrompu « que de façon progressive ». 

A LIRE aussi : Quelles sont les hypothèses de déconfinement en Normandie ?

 

 

"Ne renoncez pas aux soins, à cause du Covid 19"

Les urgentistes, tout comme l'ARS, ont encore pointé cette semaine un deuxième piège dans lequel certains malades tombent. La pandémie de Covid-19 cristallise la peur. A tel point que des malades, atteints de pathologies graves, comme un AVC ou un infarctus, craignent de se rendre aux urgences ou de se faire soigner par un médecin traitant. Une grave erreur qui pourrait leur être fatale.

C'est ce que nous vous racontions dans cet article, paru la semaine dernière et malheureusement, ce comportement ne fait que s'amplifier.
 



Quand on a une douleur à la poitrine, qui persiste et qui n'est pas normale. Faites le 15. Quand on a une paralysie subite du visage, d'un membre ou de la jambe, il faut appeler le 15, immédiatement. On est là pour ça.
Le chef des urgences de Saint-Lô, Thomas Delomas.

Les chiffres de l'ARS à retenir, ce vendredi 10 avril
741 personnes sont hospitalisées en Normandie. 
Parmi elles, 210 sont en réanimation.
512 personnes sont retournées à domicile
188 personnes sont décédées à l’hôpital depuis le début de l’épidémie. (âge médian de 81 ans).

Sur les 380 EHPAD de la région :
105 ont déclaré au moins 1 cas (résident ou personnel). Parmi eux : 39 ont des cas groupés témoignant de la circulation active du virus
79 décès ont été enregistrés, en EHPAD et à l’hôpital.

Du 24 février à aujourd’hui, 2 515 personnes ont été testées positives au COVID-19 en Normandie sur un total de 14 990 prélèvements réalisés, soit 16,8 % de positivité.
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